Au Maroc et en général dans le Maghreb , la vente et la consommation d’alcool sont des questions restées pendant longtemps taboues dans la société. Alors que la législation en vigueur punit ces actes, les autorités veulent désormais assouplir la loi.
Les lignes sont en train de bouger quant à la vente et la consommation d’alcool au Maroc. Dans ce pays conservateur, la loi de 1967 interdit tout établissement de vendre ou d’offrir une boisson alcoolique à un citoyen musulman. Et les contrevenants à cette disposition risquent jusqu’à six mois de prison ferme et doivent s’acquitter à 140 euros d’amende. Par contre, l’alcool demeure par conséquent essentiellement réservé aux touristes.
Mais cette loi qui est remise en cause par une frange de la société marocaine, pourrait être révisée bientôt. Selon le site moyen-oriental Middle East Eye, le ministre marocain de la justice, Abdellatif Ouahbi serait déterminé à abroger cette loi. L’actuel garde des Sceaux du Maroc, en fonction depuis un an et fort de sa longue carrière d’avocat, le ministre du gouvernement du centre gauche, porte le projet de dépénalisation de la vente d’alcool. Il est déterminé à « revoir certaines dispositions liberticides et proposer une réforme intégrale [du Code pénal], comprenant la dépénalisation de la consommation d’alcool par les Marocains ».
«Il faut mettre fin à cette hypocrisie le plus tôt possible »
Selon des chiffres officiels, 100 millions de litres de boissons alcooliques sont consommés dans ce pays de 37 millions d’habitants chaque année. En 2021, l’État marocain a perçu 170 millions d’euros par le biais des redevances sur l’alcool. Une situation assez paradoxale pour le ministre marocain de la justice. « Il y a des sanctions aberrantes dans le Code pénal. On dit aux gens : « N’achetez pas d’alcool mais payez quand même la taxe.’ Va-t-on considérer un jour le Marocain comme un individu responsable et libre de mener sa vie privée comme il l’entend ? », a-t-il pesté en mai dernier lors d’un débat.
La position d’Abdellatif Ouahbi sur la question de la vente d’alcool n’est pas anodine. Le Parti Authenticité et modernité (PAM) de l’actuel chef du gouvernement, vainqueur des élections en 2021, est favorable à l’abolition des lois liberticides notamment à propos de la vente et de la consommation d’alcool mais aussi sur les relations sexuelles hors mariage.
« Il n’y a rien d’extraordinaire à vouloir dépénaliser la consommation d’alcool. L’alcool est en vente partout : dans les supermarchés, les débits de boissons, les hôtels… », ajoute un des responsables du PAM, qui a requis l’anonymat. Un autre responsable du parti dénonce également une certaine hypocrisie au sein de la société marocaine sur ces questions. « Dans les faits, tout le monde sait que les Marocains boivent. Il faut mettre fin à cette hypocrisie le plus tôt possible», a-t-il dénoncé.