Lors de sa rencontre avec le Président bissau-guinéen et président de la Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), Umaro Sissoco Embaló, qui était en escale en Tunisie, mercredi 8 mars, le président de la République Kaïs Saïed a abordé la polémique suscitée par ses propos sur les Subsahariens en Tunisie.
Le Président Saïed a déclaré à son homologue bissau-guinéen qu’il était Africain et fier de l’être. Il a précisé que certaines interprétations malveillantes avaient été faites à propos de son discours sur la présence des Subsahariens en Tunisie. Il a également souligné que beaucoup de propos malveillants avaient été tenus ces derniers jours par certains responsables et journalistes qui ont voulu interpréter le discours à leur guise pour nuire à la Tunisie.
Le Président Saïed a évoqué les pratiques illégales de certains migrants africains en Tunisie, affirmant qu’aucun pays n’accepterait qu’il y ait une juridiction parallèle à celle de l’Etat. Il a dénoncé les actes de mariage qui se font en dehors de toute légalité et a exprimé son opposition à la traite des êtres humains, en particulier des Africains, que ce soit en Tunisie ou ailleurs.
Le Président Saïed a déclaré que la situation des Africains ne devrait pas être interprétée par les langues malveillantes qui ont utilisé ses propos pour propager des idées racistes. Il a souligné qu’il avait un certain nombre de membres de sa famille mariés à des Africains et que ses amis à la faculté de droit de Tunis étaient des Africains. Il a également évoqué le voisinage historique extraordinaire avec les cadres de la Banque africaine de développement (BAD). Il a déclaré que ce qui était inacceptable était de voir et d’interpréter des propos pour nuire à la Tunisie.
De son côté, le Président bissau-guinéen a exprimé son incompréhension quant à la possibilité que le Président Saïed soit xénophobe ou raciste, affirmant qu’il ne pouvait pas croire que le pays de Bourguiba adopte une telle position. Il a indiqué qu’il transmettrait cette incompréhension à certains chefs d’État de la Cédéao.
Les propos du Président Saïed, tenus le 21 février 2023 lors d’une réunion du conseil de sécurité nationale, ont suscité une grande polémique. Il avait évoqué un prétendu « plan criminel » visant à changer la composition démographique de la Tunisie. Cette affaire a pris une grande ampleur, en particulier en raison des inquiétudes exprimées par certaines parties étrangères.
Cette polémique a mis en lumière la question de la présence des Subsahariens en Tunisie. En effet, ces dernières années, la Tunisie a accueilli un nombre croissant de migrants en provenance d’Afrique subsaharienne, fuyant la pauvreté, la guerre, la persécution ou la dictature dans leur pays d’origine. Les migrants viennent principalement d’Afrique de l’Ouest, mais aussi de la Corne de l’Afrique et de l’Afrique centrale. La Tunisie est devenue une destination pour les migrants qui cherchent à atteindre l’Europe, mais aussi pour ceux qui cherchent à s’installer dans le pays.
Le gouvernement tunisien a été critiqué pour sa gestion de la crise migratoire. Il est accusé de ne pas fournir suffisamment d’assistance aux migrants, qui sont souvent confrontés à la discrimination et à l’exploitation. Certains migrants ont été détenus dans des conditions inhumaines et ont été expulsés sans procédure régulière.
Le Président Saïed a déclaré qu’il était contre la traite des êtres humains et la discrimination raciale envers les Africains. Il a également souligné que les migrants doivent se conformer aux lois de la Tunisie et ne pas créer de juridiction parallèle à celle de l’Etat. Cependant, certains ont interprété ses propos comme une manifestation de racisme envers les Africains.
La Tunisie est un pays avec une histoire complexe en matière de relations avec l’Afrique subsaharienne. Avant l’indépendance en 1956, la Tunisie était sous domination française et a été utilisée comme base pour la colonisation française de l’Afrique subsaharienne. Les relations entre les pays ont été tendues pendant la période post-indépendance, car la Tunisie a été accusée de soutenir des mouvements de libération en Afrique subsaharienne.
Cependant, la Tunisie a également des relations étroites avec certains pays africains, en particulier ceux de la Cédéao. La Tunisie est membre observateur de la Cédéao depuis 2006 et a signé un accord de coopération avec l’organisation en 2014. La Tunisie a également accueilli la première conférence ministérielle de la Cédéao sur la sécurité en 2013.
La Tunisie a également accueilli de nombreux étudiants et travailleurs africains. Selon le ministère tunisien de l’Enseignement supérieur, environ 8 000 étudiants étrangers, dont beaucoup sont originaires d’Afrique subsaharienne, étudient dans les universités tunisiennes. De nombreux travailleurs africains, notamment dans le secteur de la construction, travaillent également en Tunisie.
Malgré cela, la Tunisie a été accusée de ne pas respecter les droits des migrants et des réfugiés. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), environ 3 000 personnes ont été arrêtées en Tunisie en 2021 pour être entrées illégalement dans le pays. Les migrants sont souvent détenus dans des conditions inhumaines, sans accès à une assistance juridique ou médicale.
Le gouvernement tunisien a adopté une loi sur l’immigration en 2018 qui prévoit une meilleure protection des droits des migrants. Cependant, la mise en œuvre de la loi a été lente et les ONG ont critiqué le manque de ressources pour la mettre