Après Inès M., une pédiatre tunisienne de 36 ans, qui se retrouve dans une situation délicate en France, de nombreux autres praticiens médicaux (PADHUE), principalement d’origine maghrébine, sont également menacés d’expulsion du pays.
La crise sanitaire a révélé la précarité des milliers de médecins titulaires d’un diplôme hors Union européenne (PADHUE) travaillant dans les hôpitaux français pour des salaires insuffisants. La procédure de régularisation, initiée en 2019, prend fin le 30 avril, laissant de nombreux praticiens envisager de quitter le pays.
Tarek C., un pharmacien biologiste algérien de 31 ans, témoigne de son avenir professionnel incertain après avoir travaillé à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Comme Tarek, de nombreux médecins étrangers ont travaillé en première ligne pendant la pandémie de Covid-19, certains y laissant leur vie.
Tarek C. se souvient : « Certains de mes collègues sont décédés pendant cette période là ».
Tarek C. se désole : « On va se retrouver avec un personnel qualifié, recommandé par les chefs de service, mais au chômage alors qu’il y a un besoin énorme dans le secteur de la santé avec des services d’hôpitaux qui ferment. C’est une aberration ».
Tarek C.
Aujourd’hui, les médecins étrangers continuent d’occuper des postes essentiels dans les hôpitaux français. Par exemple, à l’hôpital Delafontaine de Saint-Denis, les deux tiers des médecins des urgences sont des PADHUE. Les postes vacants de praticiens titulaires dans les services d’urgence, de gériatrie et de psychiatrie sont estimés à 30%, délaissés par les médecins français.
Cependant, le sort des PADHUE reste en suspens. À partir du 30 avril, ceux qui n’ont pas entamé ou obtenu une procédure d’autorisation d’exercice (PAE) pour faire reconnaître leur diplôme ne pourront plus travailler dans les hôpitaux français. Parmi les 23 000 médecins PADHUE en France, plusieurs milliers sont menacés.
Pour certains l’emplois du chargé est la principale cause pour laquelle ils ne parviennent pas à faire l’équivalence de leur diplôme.
Azouaou Ait Hamou, psychiatre algérien : « On fait 8 à 9 gardes par mois, on travaille jusqu’à 12 heures par jour, comment voulez-vous qu’on ait le temps de préparer ce concours ?« .
Obtenir une PAE est un parcours difficile, avec des examens de validation des connaissances (EVC) et des places limitées. Les PADHUE sont souvent sous-payés et rencontrent des difficultés pour renouveler leur titre de séjour. Certains sont même menacés d’expulsion.
En 2019, le gouvernement français a lancé une procédure de régularisation, appelée « Stock », qui se termine le 30 avril 2023. Environ 3 500 médecins étrangers ont déposé un dossier, espérant mettre fin à leurs difficultés administratives. Cependant, les critères de cette procédure excluent les médecins arrivés pendant la crise sanitaire.
Pour aider les médecins concernés, l’association IPADECC a été créée en janvier dernier, défendant leurs droits et revendiquant 550 adhérents. Le gouvernement français envisage la création d’une carte de séjour spéciale « talent-professions médicales et de la pharmacie » dans le cadre de son projet de loi sur l’immigration prévu pour 2023.
En attendant, de nombreux médecins étrangers renoncent à faire reconnaître leur diplôme et envisagent de partir vers d’autres pays européens, tels que l’Allemagne et la Suisse, où les procédures d’intégration sont plus souples.
« Mon dossier a été accepté en Suisse, donc il ne me plus qu’à postuler dans les hôpitaux. On réfléchit encore avec ma compagne, mais si ça ne bouge pas d’ici là, on partira. » a martelé Abdelhalim M.